Actualités Bénin 18/01/2021

Restitution par la France de biens culturels au Bénin et au Sénégal

Revendication longtemps restée vaine, la restitution de biens spoliés par la France durant la colonisation en Afrique est désormais en voie d’être réalisée. Rompant avec la doctrine présidentielle qui prévalait jusqu’alors, le Président de la République française Emmanuel Macron s’était engagé lors d’un discours à l’université de Ouagadougou au Burkina Faso en 2017 à des restitutions temporaires ou définitives du patrimoine africain. La loi relative à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal du 24 décembre 2020 marque un premier pas en la matière. En effet, cette loi acte le transfert de propriété de vingt-six objets provenant du palais des rois d’Abomey au profit du Bénin. L’ensemble des œuvres composant « le Trésor de Béhanzin » furent dérobées lors de la colonisation et étaient conservées au Musée du quai Branly à Paris. Cette loi rétrocède également un sabre avec fourreau attribué à El Hadj Omar Tall au Sénégal. Désormais ces trésors africains profiteront au public béninois et sénégalais.

         Outre des obstacles politiques sur la manière de procéder à la restitution, le législateur français a dû composer avec les contraintes inhérentes au droit français. Effectivement, les musées français sont soumis à un principe d’inaliénabilité des collections publiques, ce qui empêche de facto la restitution d’œuvres. Le rapport Savoy-Sarr* suggérait une modification du code du patrimoine et l’édiction d’une procédure spécifique reposant sur un accord bilatéral entre l’Etat africain et l’Etat français. Ce n’est pas la voie qui a été décidée par le gouvernement qui a préféré une loi de circonstance dérogeant ponctuellement au principe d’inaliénabilité. Ainsi après avoir fait l’objet d’un déclassement, les œuvres seront restituées dans un délai d’un an au Bénin et au Sénégal. L’adoption de ce texte scelle une étape importante et devrait encourager d’autres pays africains comme la Côte d’Ivoire, l’Ethiopie, Madagascar et le Tchad, à réclamer leurs biens. La tâche s’annonce colossale dans la mesure où le rapport Savoy-Sarr estime que près de 90 000 œuvres d’arts ou objets africains figurent dans les collections françaises.

*Le « Rapport sur la restitution du patrimoine culturel africain. Vers une nouvelle éthique relationnelle» a été remis en novembre 2018 au Président de la République. Il est le fruit du travail de deux universitaires Mme Bénédicte Savoy, Professeure à Université de Berlin et de M. Felwine Sarr, Professeur à l’Université Gaston-Berger de Saint-Louis au Sénégal.